Les 500 ans de la Réforme, c’est aussi le moment pour se rendre compte de ce qui nous unit. Le 5 juillet dernier, la communion mondiale d’Eglises réformées a ainsi signé la « Déclaration commune sur la doctrine de la justification ». Une avancée dans le dialogue œcuménique.
A Wittenberg, là où Luther afficha ses 95 thèses sur la porte de la chapelle du château, le dialogue œcuménique a atteint un point historique, 500 ans après la rupture protestante en 1517. En présence des Eglises catholique, luthérienne et méthodiste et devant 700 personnes, la communion mondiale d’Eglises réformées (CMER) a signé la « Déclaration commune sur la doctrine de la justification ». La CMER a ainsi donné « l’accord des réformés avec le consensus sur les vérités fondamentales de la doctrine sur la justification », c’est-à-dire le salut accordé aux hommes par la grâce divine, et non en raison de leurs mérites. La CMER souligne néanmoins l’importance particulière du rapport entre la justification et l’engagement en faveur de la justice dans le monde. Ce progrès a été rendu possible par la méthodologie du « consensus différé ». Il reconnaît que l’unité de la foi peut être portée par différents langages. Il y a des différences, mais elles ne sont plus séparatrices.
En 1999, les discussions œcuméniques, amorcées à la suite du Concile Vatican II, avaient abouti à la signature du traité par la Fédération luthérienne mondiale et l’Eglise catholique, à Augsbourg en Allemagne. Les deux partis s’étaient mis d’accord sur une formulation commune sur le salut par la grâce et non sur les œuvres : « Nous confessons ensemble que la personne humaine est, pour son salut, entièrement dépendante de la grâce salvatrice de Dieu » avaient-ils déclaré. Cette question avait été au cœur de la rupture opérée au 16e siècle, lors de la Réforme. En effet, Pour l’Eglise catholique, le salut n’allait pas sans les œuvres, qui permettaient même de racheter ses péchés. Elle invitait ses fidèles à acheter des indulgences pour réduire le temps d’attente de leurs proches au purgatoire pour qu’ils accèdent plus rapidement au paradis. Mais Martin Luther et les Réformateurs se sont érigés contre cette idée en affirmant que le salut est un don gratuit de Dieu, le fameux « sola gratia ».
Nous confessons ensemble que la personne humaine est, pour son salut, entièrement dépendante de la grâce salvatrice de Dieu.
Déclaration commune sur la doctrine de la justification
L’accord de 1999 avait été « fortement voulu » par Jean-Paul II et le cardinal Ratzinger (devenu Benoît XVI en 2005) y avait personnellement travaillé. Ce texte n’avait néanmoins pas fait l’unanimité chez les Protestants. Mais en 2006, le Conseil méthodiste avait rejoint l’accord en y apportant son aval. Cette année, qui plus est de commémoration des 500 ans de la Réforme, c’était le tour de la Communion mondiale des Eglises réformées, l’une des entités les plus importantes du monde protestant, avec environ 80 millions de fidèles.
« Ce traité représente un signe d’alliance historique entre ces différentes traditions chrétiennes » selon l’hebdomadaire protestant d’actualité Réforme. Le journal La Croix parle lui d’un « texte œcuménique majeur mettant fin à 500 ans de contentieux théologique. » Cité par le journal Réforme, le pasteur Heinrich Bedford-Strohm, préseident du Conseil de l’Eglise protestante en Allemagne a déclaré vivre « un moment historique » : « Nous donnons un signe d’unité très fort dans un monde divisé. C’est un espoir d’unité pour la terre entière ». Le secrétaire général de la Fédération Luthérienne Mondiale (FML), Martin Junge, s’est aussi réjoui de ce traité : « Je pense que Martin Luther serait la personne la plus heureuse en ce jour ».
Martin Luther serait la personne la plus heureuse en ce jour.
Martin Junge
Du côté catholique, Le pape François a fait aussi part de sa satisfaction dans une missive lue lors de l’événement par le Mgr Brian Farrell, secrétaire du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. Le Conseil pontifical pour la promotion de l’Unité des chrétiens, dans un communiqué du 3 juillet, s’est réjoui qu’ « une des questions cruciales qui avait déclenché la division entre les réformateurs et les autorités de l’Église catholique au XVIe siècle a été désamorcée et résolue, et ceci permet de progresser vers une meilleure communion spirituelle et ecclésiale entre protestants et catholiques.»
Cette avancée ne se voit pas dans les faits, les Eglises restant séparées avec leur propre fonctionnement. Mais ce texte marque véritablement une nouvelle étape dans le dialogue œcuménique. Sur une question telle que la justification par la foi et le rôle premier de Dieu et de sa grâce, il est heureux de voir que des grandes confessions se retrouvent et se mettent d’accord. Tout ceci 500 ans après la Réforme. Reste à savoir quand les évangéliques, pas toujours à l’aise avec l’œcuménisme, se rapprocheront de ce dialogue.
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