Le 5ème et dernier chapitre/poème des Lamentations est différent des quatre précédents. C’est un poème plus court (de 22 versets), mais c’est surtout un poème qui n’est pas écrit en acrostiche (de façon alphabétique). Ici, le poète n’a plus besoin de dire la souffrance de son peuple de la même manière ; l’espérance qui a été exprimée par endroits aux chapitres précédents commence à prendre racine…
Ce dernier poème est une prière communautaire où le peuple s’en remet à Dieu pour lui demander de le relever et de le restaurer. Dans les chapitres précédents, la culpabilité d’Israël avait été ouvertement exprimée. Le peuple avait péché, de façon continue, et la colère de Dieu s’était abattue sur lui. Mais ici, pour conclure ce livre, le peuple demande pardon. Mais sur quelles bases s’appuie-t-il pour demander à Dieu d’être restauré ? Quels sont ses « arguments » ou plutôt, quelle est son attitude dans sa prière ?
Tout d’abord, le peuple reconnaît ouvertement sa faute : « La couronne est tombée de notre tête. Quel malheur pour nous ! Nous avons péché » (v. 16). Le peuple qui prie sait intimement et reconnaît ouvertement devant Dieu que le problème vient de sa propre rébellion envers Dieu, de son propre péché. Il ne cherche pas d’excuses, ni de circonstances atténuantes. S’il décrit tous les malheurs qui lui sont tombés dessus, s’il décrit toutes les horreurs qui ont été commises par Babylone dans Jérusalem notamment, ce n’est pas pour blâmer Babylone (qui est pourtant blâmable), mais pour reconnaître que tout cela est, en finalité, de son propre fait : « nous avons péché ».
Certes, au verset 7, le peuple semble rejeter la faute sur ses pères : « Nos pères ont péché, mais ils ne sont plus, et c’est nous qui portons le fardeau de leurs fautes ». Mais ici, comme tout au long des Lamentations (voir1.5, 8, 14, 18, 20, 22 ; 2.14, 3.40-42 ; 4.6, 13 ; 5.16), ce qui est exprimé n’est pas un transfert de culpabilité (« c’est pas moi, c’est lui ! »), mais le fait que le problème ne date pas d’hier… Le peuple reconnaît que la situation terrible dans laquelle il se trouve est le résultat d’une très longue rébellion de tout un peuple, de génération en génération. Dieu a donc été patient, le jugement aurait pu tomber il y a bien longtemps, surtout qu’il n’a eu de cesse d’avertir son peuple. « Nous avons péché » exprime la culpabilité, sans détour et sans faux-semblant du peuple.
Deuxièmement, la repentance véritable du peuple s’exprime à travers ses mains vides. Il ne s’appuie sur rien d’autre que Dieu pour être restauré. Il n’a rien à offrir, aucune rançon, aucun gage de fidélité, même à venir. Aucune tentative de dire que, quand même, il n’est pas si mauvais que cela. C’est vers la fin du poème/prière, que le peuple exprime sûrement le mieux cette attitude de dépendance totale : « Ramène-nous à toi, SEIGNEUR, et nous reviendrons ! » (v. 21). Littéralement, le verset pourrait être traduit par : « Cause que nous retournions à toi, SEIGNEUR, et nous retournerons ». Ainsi, le peuple demande que Dieu lui-même fasse en sorte que le peuple revienne à lui. Il exprime son besoin que Dieu change le cœur du peuple pour qu’il puisse revenir à lui.
Ce peuple n’a rien à offrir à Dieu. Il est pauvre et exclusivement dans le besoin face à Dieu.
Pourtant – et cela pourrait paraître contradictoire – il sait qu’il peut se baser sur les promesses de Dieu pour implorer le pardon et la restauration. Le peuple qui se repent est donc un peuple qui a foi. Cette foi s’exprime car elle s’adresse à un Dieu qui règne encore (Babylone ne l’a pas détruit – v. 18-19), mais aussi à un Dieu qu’elle sait bon et miséricordieux. Un Dieu qui a fait des promesses et qui sera fidèle pour les accomplir.
Dès le premier verset, cette foi dans les promesses de Dieu s’exprime : « Souviens-toi, SEIGNEUR, de ce qui nous est arrivé ! Regarde, vois notre déshonneur ! ». En hébreu, le verbe « se souvenir » (zakar), peut impliquer agir en conséquence (voir 2.1). Quand le peuple prie donc « Souviens-toi, Seigneur », il demande à Dieu de se souvenir de ses promesses et d’agir en conséquence, d’agir pour faire évoluer sa situation. Aujourd’hui, le trône de David n’est plus, il est détruit. Aujourd’hui, le pays est en ruine. Mais Seigneur, souviens-toi de ta promesse (par ex. 2 Samuel 7.13-16) !
Voilà pourquoi le peuple passe les 18 premiers versets de ce poème à re-décrire sa situation dramatique. Il connaît les promesses de Dieu et il sait que Dieu ne sera pas insensible à sa situation. Il demande donc humblement à Dieu de garder ses promesses à son égard, d’agir pour rétablir, pour restaurer, pour pardonner. Le peuple sait à qui il s’adresse. S’il est pauvre et s’il a les mains vides, il connaît les richesses, la libéralité et la fidélité de Dieu.
N’avons-nous pas, dans cette prière, un bel exemple à suivre dans nos propres prières de repentance ? Toujours, nous pouvons faire appel au Dieu des promesses pour être pardonné, restauré. Non pas pour faire pression sur lui, mais pour affirmer et confesser humblement notre foi en lui. Pour confesser que nous prenons au sérieux ses promesses qui sont aussi des ancres pour la foi. Dans la repentance, nous n’avions rien à offrir, mais nous avons une foi à exprimer. Sans prétention, nous nous tournons vers celui qui a accompli notre pardon et qui est fidèle et juste pour nous l’offrir à nouveau.
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