Tout d’abord, de quoi parlons-nous ? Le transhumanisme est une idéologie[1] selon laquelle nous pourrions améliorer ou perfectionner l’être humain grâce aux progrès scientifiques et technologiques. C’est ainsi d’abord une réflexion d’ordre anthropologique, avec des implications morales, religieuses, éthiques, médicales, techniques, etc.
Dans la pensée du mouvement transhumaniste, il y a premièrement la conviction que nos corps sont fragiles ou sous-exploités, et que nous avons ou aurions les moyens de pallier définitivement l’une ou l’autre faiblesse (ultimement toutes), nous permettant ainsi une utilisation pleine de nos potentialités. Mais cette première étape en appelle une seconde. S’il y a souvent d’abord l’expression d’une volonté de « réparation », c’est pour glisser immédiatement, plus ou moins rapidement, vers un principe d’amélioration de ce qui serait considéré comme médicalement sain.
Presque tous les fondateurs des GAFA et des entreprises de haute technologie, ainsi qu’une partie croissante du corps scientifique, adhèrent et fournissent les moyens pour le développement de cette idéologie. Parmi ces promoteurs, Elon Musk est certainement aujourd’hui le personnage le plus médiatisé. La présentation de la dernière puce Neuralink, issue de l’une de ses start-up, illustre assez bien ce que je viens d’énoncer plus haut, avec les dangers qui y sont attachés[2].
Imaginez en effet : Gertrude et Dorothy, cochons en apparence semblables à leurs congénères, mais dotés d’une puce dans leur cerveau. Le prototype transmet l’ensemble des signaux neurologiques des pourceaux. Ces données essentielles, avec l’aide de l’intelligence artificielle (élément important pour la réalisation du rêve transhumaniste), permettent d’envisager qu’un jour nous puissions médicalement les utiliser pour redonner l’usage de membres paralysés, si besoin par l’implant de la puce directement sur la partie de la moelle épinière endommagée.
Mais très vite, Elon Musk précise ses intentions à long terme : cet implant et cette symbiose cerveau-IA pourraient aussi servir un corps « sain » en ouvrant la possibilité de la télépathie. Ils permettraient également d’apprendre de nouvelles langues sans effort, de jouer aux jeux vidéo sans les mains, voire de « sauvegarder vos souvenirs, et aussi potentiellement les télécharger dans un autre corps ou dans un robot[3] »… Rien que ça !
Ainsi se révèle la véritable eschatologie sous-jacente au transhumanisme : dépasser les limitations inhérentes à l’être humain et devenir par là son propre créateur. Tentation prométhéenne, le transhumanisme serait donc la réponse à tous nos maux, la solution ultime qui viendra accomplir et réaliser le destin de l’humanité, et faire sa gloire.
En y regardant de plus près, le transhumanisme est incompatible avec la foi et l’espérance chrétienne :
Reconnaissons tout de même un bienfait à ces recherches « transhumanistes ». Elles permettent des progrès non négligeables dans les domaines de la science et du médical, et on ne peut nier que les sommes colossales engagées peuvent également servir des causes nobles dans ces domaines. Mais la question des limites se pose, et c’est elle qui définit notre éthique et doit conduire la réflexion de nos autorités politiques, scientifiques et médicales. Jusqu’où collectivement sommes-nous prêts à aller ? Dans quelles conditions, pour quels intérêts, et en vue de quels objectifs ? Nous rappelant que le sujet principal du transhumanisme c’est vous, c’est moi, ce sont nos enfants.
Il n’est pas anodin que le salut biblique ait dans son plan intégré l’incarnation du Fils de Dieu, venu à la rencontre de ce que nous sommes, de notre fragilité, de nos besoins et de nos limites.
Elle devrait aussi être la réflexion de nos Églises, qui bien souvent manquent le train sur de tels sujets. Car, soyons-en convaincus, le Dieu que nous servons à des choses à dire. Il n’est pas anodin que le salut biblique ait dans son plan intégré l’incarnation du Fils de Dieu, venu à la rencontre de ce que nous sommes, de notre fragilité, de nos besoins et de nos limites. Il est loin d’être anodin également que notre espérance soit dans le retour du Fils de Dieu glorifié… mais habitant toujours son corps terrestre. Face à l’espérance transhumaniste, l’espérance chrétienne se positionne quant à la nécessité d’une intervention divine. Elle est la seule réponse valable à notre désir de réconciliation, de restauration, d’humanité… mais aussi la seule réponse à la gloire à laquelle nous aspirons.
[1] Yannick Imbert parle de « courant philosophique et culturel » dans son article paru dans Théologie évangélique, vol. 14 n°2, 2015, p. 29.
[2] Voici le lien de la conférence (en anglais) : Neuralink Progress Update, Summer 2020 – YouTube
[3] Allusion à un épisode de la série « Black Mirror » disponible sur Netflix. Ce rapport aux médias d’anticipation est très intéressant.
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