Dans notre bouche, le titre de Fils de Dieu est le plus souvent attribué à Jésus-Christ. Dans la Bible, il s’agit cependant d’une expression polysémique. Elle a donc plusieurs sens et peut comprendre d’autres catégories de personnes. Ce titre implique-t-il automatiquement la divinité de la personne concernée ? Qu’ont en commun les différents référents ?
Dans l’Ancien Testament, il y a l’idée de Dieu comme père dans l’action créatrice (Ml 2.10) ; dans le Nouveau Testament, on trouve une fois l’expression fils de Dieu attribuée à une créature humaine dans sa relation au créateur. La formule vise donc dans ce cas un aspect de la théologie de la création et non de la rédemption (Lc 3.38).
L’expression peut aussi désigner en hébreu, au pluriel, des êtres célestes, comme par exemple les anges (Jb 1.6 ; Ps 29.1), ce qui témoigne de leur relation particulière avec Dieu et met en évidence leur différence avec les êtres humains.
Troisièmement, la formule peut exprimer une appartenance à Dieu au sens moral, religieux et dans le cadre d’une alliance : cela concerne Israël (Ex 4.22 ; Rm 9.4), le peuple de l’alliance, et les croyants qui sont devenus enfants de Dieu par adoption (Jn 1.12 ; Rm 8.14ss). Quand la Bible présente Dieu comme Père, ce mot n’est pas compris au sens physique – même si des métaphores de naissance et d’enfance sont utilisées – mais désigne quelqu’un qui prend soin de nous à l’image d’un père (Lc 11.11-13 ; Jc 1.17). Il y a donc une relation privilégiée, dépassant le rapport existant entre le créateur et ses créatures, qui lie certains êtres humains à Dieu. Interprétés dans ce sens, les mots fils de Dieu peuvent aussi désigner ceux qui agissent comme Dieu, en adoptant certaines de ses caractéristiques et en l’imitant (Lc 6.35 ; 1 Jn 3.9), et qui, par cela, jouent le rôle de ses représentants.
Bien évidemment, l’expression a aussi un sens messianique, ou royal : le roi davidique est adopté par Dieu (2 S 7.14 ; Ps 2.7), comme cela était la coutume dans le Proche-Orient ancien où l’intronisation d’un roi correspondait à son adoption par la divinité du peuple. Ceci met en évidence que ce sens n’implique pas nécessairement la divinité de la personne concernée.
Finalement, le titre Fils de Dieu peut avoir un sens théologique, ou ontologique. Jésus-Christ peut être appelé Fils de Dieu à cause de la nature divine qu’il partage avec les deux autres personnes de la Trinité (Lc 1.35 ; Hé 4.14 ; 1 Jn 4.15). L’expression met alors l’accent sur son identité divine, car le Fils est celui qui révèle la présence de Dieu.
Dans les cas où Jésus figure comme seul référent possible, ce titre reflète la relation particulière et unique qui unit Jésus à son Père. Il s’agit d’une relation d’intimité qui s’exprime par l’obéissance (Hé 5.8) et l’engagement en vue de l’accomplissement de la mission qui lui a été confiée (Jn 4.34). Ces éléments montrent que la filiation du peuple de Dieu, mentionnée plus haut, avec ses différences et ses ressemblances, est étroitement liée à celle de Jésus. Concernant Jésus, la distinction entre sens messianique – sens visant l’alliance, exprimant une relation privilégiée avec Dieu –, et sens théologique n’est pas toujours évidente.
Il semble donc clair que l’expression Fils de Dieu en elle-même n’implique pas automatiquement que le référent soit de nature divine, et que c’est davantage celui ou ceux qu’elle désigne qui détermine(nt) la compréhension de l’expression.
Le point commun entre ces différentes significations se trouve dans la notion de paternité de Dieu, qui exprime une relation particulière. Indépendamment de la nature et de l’identité des référents, ce titre n’a jamais un sens physique, charnel ou temporel, mais communique une réalité spirituelle et s’inscrit dans le cadre de l’alliance. En outre, il convient de relever qu’à l’exception de Jésus et des rois à certains endroits, ce titre ne s’applique pas aux individus, mais à des groupes de personnes, le peuple de Dieu le plus souvent.
Puissions-nous, à l’exemple de notre frère aîné (Rm 8.29), être bel et bien des fils et des filles de Dieu qui marchent sous son regard de Père (1 Jn 3.1) !
D.R. Bauer, « Son of God », dans J. B. Green, S. McKnight, I. H. Marshall, sous dir., Dictionary of Jesus and the Gospels, IVP, 1992, p. 769-775.
E. Ladd, « Le Fils de Dieu », dans Théologie du Nouveau Testament, chapitre 12, coll. Théologie, Excelsis, 1999, p. 171 – 184.
D.W.B. Robinson et A.T. Millard, « Fils de Dieu », dans Le Grand Dictionnaire de la Bible, éd. rév., Excelsis, 2004, p.604-606.
Nous utilisons des cookies non-publicitaires pour rendre ce site plus clair. Si vous le souhaitez, vous pouvez les désactiver. Bonne visite sur Point-Théo !