Pour la deuxième année de suite, nous célébrons Pâques en petit. Pas de culte de l’aube de Pâques sur les sommets, pas de ‘À toi la gloire’ entonné par des centaines de personnes dans les rues. Dommage. J’aime ces célébrations tôt le matin, après ces trois jours d’attente depuis le rappel de la mort de Christ.
Pourtant, dans ce confinement, je me demande ce qui nous manque vraiment, en tant qu’Église, pour vivre la résurrection et transmettre ce message d’espérance aux gens qui nous entourent. Le confinement empêche certes des cultes ‘normaux’ (entendons par là des cultes comme vécus ces 10 ou 100 dernières années), mais freine-t-il vraiment l’Église ? Luther et Calvin ne chantaient pas ‘À toi la gloire !’ et avaient des canaux de communications bien plus limités que nous : pas de médias électroniques, pas de sono ni beamer, et des moyens de déplacements compliqués et dangereux. Les disciples non plus n’ont pas chanté ‘À toi la gloire !’ devant le tombeau vide. Et les Israélites en Égypte n’ont pas chanté ‘À toi la gloire !’ lors de la première Pâques.
Une partie infime
Malgré cela, Dieu a agi, conduit Israël, dirigé l’Église et touché des vies, des personnes, des communautés. Alors de quoi le confinement nous prive-t-il exactement ? Certes, il nous prive de ces temps de retrouvailles et d’adoration communs, si précieux ! Mais en même temps, ces moments ne sont qu’une partie infime de la vie de l’Église : environ 2 heures sur les 168 de la semaine (7x 24 heures) où l’Église est pleinement Corps du Christ, vivant, travaillant, aidant, aimant à la suite du Christ, par la force de son Esprit. Le confinement empêche donc mathématiquement 1,1 % de la vie d’Église dans sa forme précédente. Il en reste 98,9 % qui n’ont pas changé, sur lesquels le Christ ressuscité que nous célébrons règne pleinement. Qu’en faisons-nous ?
Malgré cela, Dieu a agi, conduit Israël, dirigé l’Église et touché des vies, des personnes, des communautés.
Le défi des 98,9%
J’aimerais nous lancer un défi : et si, plutôt que de chercher à voir comment ‘remplacer’ ce 1,1 %, nous cherchions à nous assurer que les 98,9 % sont pleinement vécus, par chacun, comme vie de l’Église, par la puissance de l’Esprit, et sous la seigneurie de Christ ?
Pour y arriver, j’aimerais poser trois questions bien connues qui peuvent aider à fixer les priorités pour la suite de notre vie d’Église :
- Les personnes de ma communauté sont-elles consciences qu’elles vivent le Corps de Christ 168 heures par semaine – et ce avec ou sans confinement ?
- Est-ce que nous investissons la majeure partie de notre temps de ministère et de notre énergie dans l’organisation des 2 heures de culte hebdomadaire, ou dans la préparation, la formation et le soutien des personnes pour les 166 autres heures ?
- Est-ce que nous savons, en tant que responsables de communauté, quels sont les besoins de notre communauté (formation, échange, prière, soutien pratique, accompagnement…) pour que chacun puisse vivre pleinement son appel lors de ces 166 heures ?
L’enjeu derrière ces questions n’est pas tant celui du confinement, limité dans le temps ; c’est l’enjeu de l’identité fondamentale de l’Église, en tout temps, ainsi que celui de l’identité et de la mission de chaque croyant. C’est donc la santé et le témoignage à long-terme de l’Église et de ses membres qui se jouent dans ces questions.
C’est Pâques, fête de la résurrection et de la vie en abondance. Le confinement nous force à revisiter les deux heures hebdomadaires de culte (et c’est certes ennuyeux), mais il nous offre une occasion si nécessaire de revisiter et donner vie aux 166 autres heures de la semaine, pour l’entier de l’Église : comment les intégrons-nous dans notre programme de Corps du Christ ? Comment nous préparons-nous à les vivre de la pleine vie du Christ ressuscité ?
Certes, répondre à ces questions n’est pas suffisant pour s’assurer de la santé de l’Église, mais pensons aux enjeux sous-jacents : passer de quelques heures par semaine d’engagement ecclésial par membre à 168 heures de vie ressuscitée, par et pour Christ, n’est pas négligeable ! Osons ne pas perdre de vue l’ensemble de ce qu’est l’Église et investir, pour la santé de nos Églises à long-terme, sur ces nombreuses heures qui font la différence et produisent la vie pour les croyants et pour le monde. Avoir des cultes ‘un peu moins parfaits techniquement’ n’est peut-être pas si grave si en échange nous pouvons vivre l’Église, adorer et servir 166 heures de plus par semaine !
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