Lire la Bible pendant la louange, pour certains, serait interrompre le flot des chants et donc casser l’ambiance, voire déranger l’adorateur… Parfois, la première lecture biblique, dans le culte dominical, arrive au moment de l’introduction à la prédication.
Dans la plupart de nos Églises évangéliques, la lecture de la Bible occupe le temps le plus court dans le culte (nettement plus court que les annonces !). Dans l’Église évangélique typique, aux USA, le pourcentage du culte attribué à la lecture de la Parole de Dieu serait de 2 %[1]. Ce phénomène semble bien être un paradoxe, étant donné l’importance que le mouvement évangélique dit attacher à la Parole de Dieu.
L’enjeu de la lecture de la Parole
Cette réalité serait-elle une réaction à notre manière d’aborder la lecture biblique dans le culte ? Il est vrai que nos lectures sont parfois ennuyeuses, parfois peu audibles, sans expression ni intelligence du texte. Les auditeurs ne sont pas encouragés à écouter la voix de Dieu (cela vient après, dans la prédication !). La pratique du président du culte qui martelait autrefois son mini-message par une lecture trop longue en début du culte a peut-être créé une ambiance trop lourde pour ce qu’on veut vivre pendant le moment de la louange. Ou alors, la lecture en soi, exécutée par le pasteur ou quelqu’un d’autre, serait-elle devenue un exercice d’évaluation de son français ou de sa capacité de lire en public ?
Dans certains milieux, nos choix de chants pourraient suggérer que c’est moi qui dis à Dieu pourquoi je suis là et ce que j’attends de Lui. On serait ainsi tombé dans une conception anthropocentrique de la louange. Cependant, si le but de la louange est de rencontrer le Dieu de la Bible, de l’entendre, de l’écouter, j’aimerais suggérer qu’écouter ses paroles plutôt que les nôtres ne peut qu’être bénéfique.
Lorsque l’écriture est suivie par un chant qui fait écho et qui répond à la vérité de la Bible, nos pensées ainsi que nos émotions sont engagées. Cela fait sens de marier la substance de la Parole avec le pouvoir d’un chant, celui-ci servant à être un « Amen » musical à la vérité de la Parole de Dieu. La meilleure manière de cibler nos pensées sur Dieu ne serait-il pas de le laisser nous parler et de nous approprier les paroles inspirées de sa Parole, qu’il adresse à des individus dans le monde entier et ceci dans toutes les générations depuis des siècles ?
La lecture publique de la Torah a commencé au Mont Sinaï, selon Exode 24. Le but était la récitation de l’histoire et des actes rédempteurs de Dieu. Vue comme source de joie et de vie, la Torah était la manière dont YHWH exprimait son amour pour son peuple. À des moments de crises dans l’histoire d’Israël, la lecture publique de la Torah servait à rappeler les gens à Dieu, pour qu’ils réaffirment leur identité de peuple de Dieu.
La lecture publique de la Torah servait à rappeler les gens à Dieu
La lecture publique de l’Écriture, dans les Églises du Nouveau Testament, servait à localiser la nouvelle identité des croyants dans l’événement du Christ, particulièrement dans ses éléments fondamentaux de la crucifixion et de la résurrection.
Osons-nous réfléchir de manière créative à la façon de redonner de la valeur à la lecture biblique pour qu’elle nourrisse notre louange ? S’il y a un contact avec les auditeurs, s’il y a mouvement, un visuel, plutôt que de demander aux gens de suivre la lecture, on pourrait redynamiser la lecture de la Bible en la plaçant à des moments opportuns de la louange. On pourrait la laisser s’insérer, de manière naturelle, dans plusieurs parties de la louange dont voici quelques exemples :
Quelques-idées pour le responsable de louange
1. Au lieu de raconter combien était difficile la semaine ou pourquoi il aime tel ou tel chant, le « leader » du groupe de louange pourrait commencer le moment de louange en lisant un des textes ci-dessous comme appel à la louange, par exemple :
Venez, crions notre joie en l’honneur de l’Éternel !
Acclamons notre rocher car il est notre Sauveur !
Présentons-nous devant lui avec des prières de reconnaissance.
Acclamons-le en musique (Ps 95.1-2) ?
Ou :
Dieu est monté jusqu’à son temple parmi les cris de la victoire.
Il est monté au son du cor, lui, l’Éternel.
Oui, l’Éternel est grand ! Il est bien digne qu’on le célèbre dans la cité de notre Dieu, sur sa montagne sainte (Ps 47.6 ; 48.2).
Ceci pourrait nous aider, nous l’assemblée, à nous centrer sur Dieu au début du culte plutôt que sur nous-mêmes. Cela change la donne si l’on sait que c’est Dieu qui nous invite à la louange plutôt que l’inverse. Cette lecture peut se faire pendant l’introduction musicale ou juste avant le début d’un chant de louange tel que « Le Roi dans sa Splendeur » (JEM 870) ou autre chant de louange classique.
2. Une lecture comme préparation de l’assemblée pour la Cène :
Si l’assemblée a l’habitude de chanter juste avant la lecture de l’institution de la Cène, on pourrait l’inviter debout à déclarer sa foi en Christ en lisant collectivement (avec projection sur l’écran pour tous lire de la même traduction) une partie de l’hymne de Philippiens 2 :
Jésus s’abaissa lui-même
en devenant obéissant,
jusqu’à subir la mort,
oui, la mort sur la croix.
C’est pourquoi Dieu l’a élevé
à la plus haute place
et il lui a donné le nom
qui est au-dessus de tout nom (etc.)
La lecture étant suivie d’un chant tel que : « Tu es venu jusqu’à nous » (JEM 553).
3. On peut aussi prier entre les chants en employant des prières tirées directement de l’Écriture, tel que,
J’ai levé les yeux vers toi,
toi qui sièges dans les cieux……
ainsi nos regards se tournent vers toi, l’Éternel, notre Dieu,
dans l’attente de ta grâce (Ps 123.1-2b).
On pourrait entamer un chant qui continue la prière tel que : « Ouvre les yeux de mon cœur » (JEM 694).
Conclusion
L’Écriture n’est pas simplement pour introduire la prédication, mais, comme le dit Mitman, « tous les actes, comme la prédication, grandissent d’un rapport avec les textes bibliques et interagissent les uns avec les autres, de manière homilétique et liturgique pour rendre possible la leitourgia, littéralement l’œuvre de la communauté d’adorateurs. C’est le rôle de la personne qui élabore le plan de la louange de permettre aux Écritures de former une série d’expressions individuelles qui, ensemble faciliteront la capacité de la communauté des adorateurs à expérimenter un évènement collectif[2] ».
On peut ainsi permettre à la Parole d’imprégner notre louange et faire en sorte que la compartimentalisation entre la première et deuxième partie qui peut exister dans nos cultes soit moins ressentie, et ainsi mieux nourrir le contenu des moments de louange. Comme l’apôtre Paul le dit à l’Église à Colosses :
Que la Parole de Christ réside au milieu de vous dans toute sa richesse : qu’elle vous inspire une pleine sagesse, pour vous instruire et vous avertir les uns les autres ou pour chanter à Dieu de tout votre cœur des psaumes, des hymnes et des cantiques inspirés par l’Esprit afin d’exprimer votre reconnaissance à Dieu (Col 3.16).
[1] Constance Cherry, The Role of Music in Worship, Cours DWS702, Institute of Worship Studies, Jacksonville, USA, juin 2008.
[2] F. Russell Mitman, Worship in the Shape of Scripture. Cleveland: Pilgrim Press, 2001. 33
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