L’ancienne alliance, langage de la nouvelle alliance (2)

L’ancienne alliance, langage de la nouvelle alliance (2)

Un récit de révélation : mise en perspective

Dans une première partie, nous avons vu comment la transfiguration nous était racontée dans le langage de l’Ancien Testament. Ce récit nous renvoie en particulier aux théophanies dont Moïse et Elie ont été les bénéficiaires, eux qui sont précisément les personnages qui entourent Jésus. En Jésus, c’est toute la gloire de l’ancienne alliance qui s’exprime… et même plus !

L’ancienne alliance, « langage » de la nouvelle

Comme du temps du Sinaï, la nuée descend et couvre la montagne, une nuée lumineuse, signe de la présence de Dieu. Et remarquez, même la manière dont la voix de Dieu s’exprime rappelle l’Ancien Testament. « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; c’est en lui que j’ai pris plaisir » évoque ce que Dieu dit du serviteur (Es 42.1) qui sera envoyé pour sauver son peuple et établir la justice. Comme Moïse a ordonné au peuple d’écouter le prophète que Dieu enverrait après lui (Dt 18.5), la nuée ordonne aux disciples d’écouter le Fils. Cette révélation parle le langage de l’ancienne alliance. Elle montre au lecteur que celui qui est au centre de cette vision, Jésus, est comme un Nouveau Moïse, un Nouvel Elie, un prophète envoyé pour conduire le peuple vers une destination glorieuse. Mais il n’est pas seulement le prophète, il n’est pas seulement le serviteur de Dieu, il est le Fils de Dieu. Tout ce qu’il y avait de glorieux dans l’Ancien Testament est concentré en Jésus, mais en version 2.0 ! La présence de Dieu dans cette nuée est d’une telle densité que le temps n’est plus à proposer un camping improvisé dans la montagne, mais à ne plus rien proposer d’autre que l’adoration. Les disciples se prosternent, cachent leur face devant cette révélation bien trop éblouissante pour eux. Un temps d’éternité, qui conduit à une adoration respectueuse et craintive. La sainteté de Dieu imprègne la scène, et la manifestation de la gloire de Dieu suscite la crainte révérencielle.

Retour à la case départ… Enfin, pas tout à fait

Puis, plus rien… Un toucher, celui de Jésus, sa voix, apparemment habituelle, et plus rien, plus personne, que Jésus, seul. Son apparence ne semble plus être si différente de celle du Jésus habituel.  Combien de temps cela a-t-il duré ? Personne ne saurait le dire… Mais les disciples ne camperont pas dans la gloire de Dieu, Jésus ne dirigera pas la Judée à partir de cette montagne ennuagée de gloire, il faudra redescendre… Reprendre le chemin, le chemin de Jérusalem, qui est, pour Jésus, le chemin de la croix. Roi, prophète, il sera aussi dans son corps le sacrifice pour le péché. D’ailleurs, redescendre, c’est immédiatement retrouver le combat contre le mal. Comme Moïse qui, après la révélation au Sinaï, a immédiatement été confronté à une célébration orgiaque et idolâtre en descendant (le veau d’or), Jésus sera confronté à la puissance du mal : un enfant qu’un démon faisait souffrir, avait besoin de délivrance (17.14s). Mais quelque chose a changé pour les trois disciples-témoins : ils ont vu la gloire de Dieu. Ils en témoigneront, après la résurrection, et c’est ainsi que nous en avons la trace dans les Évangiles. Et la gloire de Dieu, rendue sensible au travers de cette expérience extraordinaire, et compréhensible pour nous par le langage de l’ancienne alliance, marquera la manière dont ils regarderont Jésus ensuite.

Ce « langage de l’ancienne alliance » était le (seul) langage approprié pour évoquer ce moment de révélation de la gloire de Dieu qui excède toute description.

Ce « langage de l’ancienne alliance » était le (seul) langage approprié pour évoquer ce moment de révélation de la gloire de Dieu qui excède toute description.

Peut-être peut-il d’ailleurs nous aider à comprendre un autre moment de révélation qui lui est comme symétrique.

L’écho d’une autre révélation…

À la fin de l’Évangile, Jésus, en haut d’une montagne, ne sera plus entouré d’Elie et Moïse, mais de deux malfaiteurs. Il ne baignera pas dans une nuée lumineuse et glorieuse, mais dans les ténèbres qui expriment le jugement de Dieu sur le péché de son peuple. Trois témoins présents seront mentionnés : pas ces trois disciples, mais trois femmes (Mt 27.56). Là aussi, Jésus sera confessé «  Fils de Dieu », mais par un homme cette fois, et d’ailleurs un païen… Pour que l’expérience de la transfiguration soit porteuse d’espérance pour tous les hommes, il fallait que le Fils bien-aimé traverse l’épreuve de la passion. C’est à Golgotha que se révèlerait la toute-puissance glorieuse de l’amour infini qui s’humilie et se donne jusqu’à la mort, sans pour autant se perdre.

C’est à Golgotha que se révèlerait la toute-puissance glorieuse de l’amour infini qui s’humilie et se donne jusqu’à la mort, sans pour autant se perdre.

Ce sont les deux faces de l’unique Évangile dont doit rendre compte toute théologie chrétienne : il n’y a pas de théologie de la gloire sans théologie de la croix, ni de théologie de la croix sans théologie de la gloire. La gloire relève de notre espérance et de l’avant-goût que peut parfois nous en donner l’expérience chrétienne. La croix relève de la nécessité d’un présent encore marqué par le péché, où se révèle l’amour qui donne, se donne et pardonne pour communiquer la vie. Le fait que ce soit Dieu le Fils qui donne Sa vie pour communiquer la vie dépasse tout ce que les prophètes de l’Ancienne Alliance pouvaient imaginer.

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